Biomimesis

Naturellement génial !

Nature en ville !

Quelle est la place de la nature en ville ?
Dans cet article de rentrée nous allons présenter la place de la nature hier, aujourd’hui et demain, au sein d’une ville emblématique, New York. Nous tenterons d’apporter des éléments de réflexion enrichis des connaissances du fonctionnement du vivant. (version intégrale du texte écrit pour l’expo : Ville biomimétique, ville de demain)

Hier,
central park la pensée urbaine américaine fut fondée sur la conquête des espaces, le défrichage des terres vues comme inhospitalières, la transformation de la nature en paysage humain. New York a été conçu avec un plan en damier pouvant se développer à l’infini. Plus tard, le First Park Act de 1876 dote New York d’un grand espace vert, Central Park.  Avec l’essor de l’agronomie et de l’art des jardins, la France de son coté, invente les jardins à la française qui conduisent à la codification esthétique du paysage. Palais et monuments s’ornent de parcs, jardins, allées plantées. Aussi bien à New York qu’à Paris, ces derniers sont autant d’inventions humaines du paysage. Ces espaces publics paysagés sont le lieu d’une mise en scène artistique du « beau paysage », un « tableau vivant » où la nature est maitrisée, cloisonnée par du béton et du métal, séparée des lieux de vie urbains et donnée en spectacle.

Hign lineAujourd’hui,
on observe une volonté de déploiement de la végétation dans l’espace urbain composé d’une  mosaïque d’espaces ouverts plantés, de cheminements intérieurs arborés qui sont censés traduire une « ville nature ». Elle s’immisce sur les constructions, les façades, les toits, et les espaces publics. Des parcs en réseau, trames vertes, coulées vertes, ou autres waterfronts, green open spaces, parks aux Etats-Unis, sont déployés pour renouveler les espaces publics. Mais, les projets présentent le plus souvent une nature aménagée, maîtrisée, voire marketée par la puissance publique où la biodiversité (souvent uniquement plantée) reste parfaitement gérée.

Demain,
les villes seront réconciliées avec l’ensemble plus vaste que constitue la biosphère, en comprenant qu’elles dépendent des services écosystémiques délivrés par celle-ci. Les arbres par exemple jouent un rôle de purification de l’air, canalisent le ruissellement des eaux pluviales, régulent la température dans le microclimat urbain et influent sur le bien être des habitants. Ils hébergent toute une biodiversité faunistique qui, par son activité, ses chants, servent la ville. Il s’agit donc de décloisonner la nature en ville, de l’ouvrir et de faire pénétrer son environnement. Place à la vie sous toutes ses formes, du vivre ensemble nature et hommes. Une coexistence interactive de différentes mixités sociales humaines, d’espèces végétales, animales et autres règnes, pour que la ville soit un endroit organique qui vit en harmonie avec son environnement, que l’on habite et que l’on ressent. Un écosystème bio-urbain spontané, avant tout social, mis en œuvre par et pour les gens et la nature. L’introduction de la nature en ville implique donc un changement de paradigme sur la conception même du paysage urbain.

projey NY Terreformterreform smart city 2025

Le cabinet Terraform nous livre ici sa vision  de ce que pourrait devenir New York demain où la nature serait réintégrée dans la ville. Cela va bien au-delà d’un «verdissement» des lieux – il s’agit d’une approche holistique où la ville ne pollue plus et peut devenir auto-suffisante à l’aide de cultures agricoles et d’un fonctionnement en boucle de tous ses flux (eau, air, énergie, déchets, etc.).

Terreform Final parkAgriculture urbaine
En France, 78% de la population est urbaine et ce chiffe continue d’augmenter. L’étalement urbain empiète sur les espaces ruraux agricoles, notamment ceux dédiés à la production maraîchère qui naguère ceinturaient nos grandes villes. Les liens humains entre producteurs et consommateurs se distendent. En parallèle, la pollution lié au transport des denrées augmente, les ressources en eau sont accaparées par l’agriculture (95% de la demande en eau mondiale est destinée à l’agriculture), les ressources halieutiques sont en danger à cause des pêches intensives qui constituent une menace réelle pour l’industrie de la pêche, pour les écosystèmes marins et leurs biodiversités. L’équation n’est pas équilibrée : plus de besoins agro-alimentaires mais moins de ressources et d’espace de production.

Nous pouvons alors imaginer une ville qui pourrait nourrir ses propres habitants, où l’on connaitrait personnellement chaque cultivateur et où les fruits et légumes ne seraient pas sélectionnés pour leur résistance au transport mais pour leur goûts. L’agriculture urbaine est possible. En plus de redonner du lien, elle permettrait de donner aux zones urbaines une plus grande résilience, et une moindre dépendance aux énergies fossiles.
La nécessité de préserver les ressources tout en diversifiant et en améliorant notre alimentation plaide pour un développement de l’agriculture urbaine, avec à la clé la création d’emplois de qualité, de proximité, et non délocalisables car situés à proximité des lieux de consommation.

Aquaponie urbaine

Photo de Marc Laberge, Cultures Aquaponiques M.L. inc.

Dans ce contexte, l’aquaponie urbaine, méthode consistant à combiner plusieurs productions agricoles complémentaires, offre une solution limitant la consommation d’espace, d’intrants et d’eau. L’association, dans un système intégré de l’aquaculture (élevage de poissons) et de l’hydroponie (culture de plantes hors-sol), permet d’économiser 90% d’eau par rapport aux deux systèmes utilisés séparément. En mimant le fonctionnement des écosystèmes naturels, ce principe de culture où poissons, bactéries et plantes coopèrent relève du biomimétisme et de l’économie circulaire. Une serre aquaponique pouvant être installée n’importe où, la production peut se faire à proximité des lieux de consommation, ce qui limite les émissions de CO2 dues au transport. Une bonne exposition permet la limitation des éclairages artificiels et la consommation d’électricité. Il s’agit d’une approche durable et écosystémique de la production de nourriture. Des projets de fermes aquaponiques se multiplient un peu partout dans le monde actuellement.

A des fins d’économie d’énergie et d’espace, les bacs à plantes sont superposés, des panneaux photovoltaïques apportent de l’énergie renouvelable et l’eau se renouvelle grâce à la récupération de l’eau de pluie. La production est nécessairement réalisée sans antibiotiques pour les poissons, puisque ces produits nuisent à l’activité bactérienne nécessaire au maintien de la qualité de l’eau. De même, les fertilisants ou les pesticides sont proscrits puisqu’ils sont nocifs aux poissons. La production agro-piscicole est alors saine, de bonne qualité nutritive, disponible toute l’année et en grande quantités.

Ce principe de production mime le fonctionnement des écosystèmes, en reproduisant une chaine alimentaire simplifiée, impliquant des producteurs primaires (végétaux), des consommateurs (poissons) et des recycleurs (lombrics ou larves d’insectes, bactéries). A ce titre, ce système d’aquaponie relève du niveau 3 du biomimétisme : écosystème et symbiose et fonctionne en circuit fermé au niveau des ressources et de l’efficacité énergétique. L’eau circule dans tout le système et transporte l’ammoniac provenant de l’activité des poissons vers le substrat dans lequel poussent les plantes. Les bactéries, naturellement présentes dans l’eau, transforment cet ammoniac d’abord en nitrites puis en nitrates, et ces nitrates sont consommés par les plantes, purifiant l’eau. Celle-ci peut alors retourner vers les aquariums à poissons. Les déchets végétaux des plantes cultivées peuvent être compostés et utilisés pour nourrir des larves, qui serviront elles-mêmes de nourriture aux poissons. Les rendements attendus sont très favorables par rapport à l’agriculture traditionnelle tant pour la production de poissons que pour les plantes qui poussent jusqu’à trois fois plus rapidement.

ferme Lufa, Canada

Ferme urbaine
En 2011 voyait le jour à Montréal la première serre commerciale sur un toit au monde. Grâce à l’innovation et aux nouvelles technologies, ces fermes changent la façon dont les habitants de la ville se nourrissent.
Le concept est simple : rendre les villes auto-suffisantes au niveau des fruits et légumes en les cultivant là où les gens vivent et de façon plus durable tout en développant un modèle de production alimentaire qui soit efficace, rentable et modulable. Cette solution innovante consiste à produire sans pesticides ni OGM, au cœur des grandes métropoles en implantant des cultures sur les toits de la ville. En effet, Mohamed Hage, créateur du concept et fondateur des Fermes Lufa, a imaginé et conçu une serre pouvant être placée sur les toits de bâtiments industriels. Actuellement, les serres fournissent de la laitue, des tomates, des concombres, des poivrons, ou encore des herbes fraîches soit un choix parmi 120 espèces.
Le fonctionnement est écosystémique : l’eau de pluie est récupérée pour la culture hydroponique des plantes. La consommation d’énergie est minimisée en absorbant la chaleur de l’édifice en dessous et en plaçant des rideaux énergétiques la nuit pour conserver la chaleur. Les insectes utiles, comme la coccinelle et le bourdon sont introduits dans la serre, pour lutter contre les insectes nuisibles et éviter ainsi l’utilisation de produits chimiques et pour la pollinisation des fleurs. L’approvisionnement de chaque plante en eau et en nutriments est commandé à distance grâce aux dernières technologies numériques.
Conséquences, 2000 personnes achètent des légumes et des fruits sains cueillis à maturité le jour même. Les collectivités locales telles que les écoles sont également approvisionnées en produits frais chaque jour ! Des visites sont également organisées dans la ferme pour que les enfants puissent voir d’où viennent réellement les tomates, les concombres, les pastèques…

ferme Lufa, Canada

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This entry was posted on 2 septembre 2014 by in Biomimétisme, ville de demain and tagged , , , .